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Enfants autistes : les oubliés du moment ?

L’autisme. Ce monde étrange suscite et génère tant de tensions, particulièrement en ce moment. Confinés en permanence, les enfants autistes ne parlent pas le langage des mots, le langage des « hommes ». Ils vivent en retrait, éloignés des codes de la communication tels que nous les connaissons. Aujourd’hui bien plus encore, les autistes sont emmurés dans le silence de l’isolement, repliés dans un contexte de crise qui agite et bouscule complètement leur besoin presque vital de repères.

« Être autiste, c’est vivre dans un monde dont on n’a pas les clefs, un monde incompréhensible, chaotique. C’est entendre des mots qui ne sont que des bruits sans signification. » épingle La Libre. L’autisme toucherait un pour cent de la population. Actuellement, cette maladie fait encore l’objet de recherches quant à ses causes, elle patiente toujours dans la salle d’attente des thérapies envisageables. Intrigante et parfois incernable, l’affection qu’endure ce pourcentage de personnes, parmi lesquelles des enfants, nous échappe au point de nous déranger.

Travaillant depuis des années, en symbiose avec des enfants autistes, Thomas Debauche, professeur de tennis au Wimbledon Tennis Club de Rhode-Saint-Genèse, nous éclaire sur le sujet. « Je pense que fondamentalement l'autisme est un état et non une maladie. Cet état est caractérisé par un manque d'ouverture spontanée aux autres et au monde qui l'entoure [l’enfant autiste], surtout que ce monde est en perpétuel mouvement et transformation. Ce qui perturbe énormément les enfants autistes qui ont besoin de points d'ancrage et de repères qui subissent le moins possible de changements. ». Il insiste sur la nécessité d’apporter à l’enfant un équilibre de vie basé sur des référents solides surtout dans le climat anesthésiant et anxiogène de la crise. Le confinement ne fait que renforcer l’instabilité redoutée par l’autiste. Il perd le sens de ses journées et sa motivation à maitriser le réel (aussi éprouvante soit elle) s’en retrouve fragilisée. Thomas Debauche continue en pointant l’importance de l’activité physique dans l’atmosphère globale de l’autiste, dans le fil continu de son existence « Le sport est essentiel dans le développement de tous les enfants. Développement moteur, social et psychologique. Les enfants autistes apprennent grâce à leur capacité à imiter, à retenir, à mémoriser, à stocker et à ressortir les informations le moment venu. Ces informations doivent leur être transmises de façon différente avec ordre, méthodologie et continuité ». Assimilés correctement, les éléments d’apprentissage qui sont communiqués à l’enfant pendant les cours lui permettent de prendre conscience de ses capacités. Son attitude corporelle change petit à petit, son évolution se remarque dans l’envie et le plaisir qu’il ressent en réalisant l’activité. Reproduire la gestuelle de l’autre, maintenir le contact une heure entière avec le professeur, le moniteur ou les autres enfants provoquent une satisfaction et un ravissement incroyables. Le défi réside alors dans le dépassement de soi.

Que représente la crise dans l’univers de l’enfant autiste ? « L’habitude, rythmée et réglée comme du papier à musique est complètement déstructurée et désordonnée » énonce Thomas Debauche. Il signale le dérèglement interne qui surgit dans des situations exceptionnelles, situations qui sortent donc de l’ordinaire bien connu et étudié de l’autiste. Ceci pouvant engendrer des tensions fortes, une détresse nouvelle et des troubles intensifiés. « Les autistes font face à une sorte d’anarchie situationnelle ». Il soutient que la pratique du tennis, et d’autres activités, s’intègre complètement dans la rythmique de l’enfant autiste. Ce dernier dépasse son enfermement et se force à tisser du lien.

Sans le bouclier des mots, les autistes avancent plus vulnérables et sensibles que les autres. Leurs peurs sont bruyantes, leur univers se déploie ailleurs que dans la parole, entre l’ombre et la lumière, ils luttent pour donner du sens à la réalité. Même si leur mode de fonctionnement dépasse notre compréhension, leur humanité nous rassemble. Satisfactions, douleurs et joies, finalement communes à tous, donnent du relief à leur vie, les incitent à se rapprocher du monde environnant. Dans l’espoir d’un apaisement futur, continuons de préserver l’ordre et la régularité dans la vie de ces êtres profondément réceptifs.

(Anne-Sophie Debauche - Source : La Libre - Illustration : Pixabay - nickelbabe)

Anne-Sophie Debauche

Anne-Sophie Debauche

Rédactrice web - bien être et beauté au naturel - testeuse cosmétiques - écriture addict

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