Tagtik

Fouilles et nudité, l'arbitraire dans nos prisons

Dans toutes les prisons de Belgique, c'est le même refrain : "A poil!". D'après le rapport, tous les établissements pénitentiaires ont en effet systématiquement recours à la fouille à nu des détenus à chaque écrou (entrée en prison en venant de liberté) et à chaque mise au cachot. Sans lien avec le profil de risque du détenu. Sans lien avec à son comportement. Sans respect pour sa personne, ses convictions religieuses ou son intimité.

Dans certaines prisons, les détenus doivent aussi enlever tous leurs vêtements lorsqu'ils arrivent sous escorte policière, au retour d’une permission de sortie, de congé pénitentiaire ou de détention limitée. Des fouilles à nu aléatoires sont aussi organisées dans plusieurs établissements après les visites "à table".

De l'anecdotique, de l'exceptionnel? Pas du tout. Ces dérives ont été relevées par une enquête détaillée du Médiateur fédéral dans 12 maisons d’arrêt des trois Régions du pays, auprès de plus de 200 détenus et de près de 150 membres du personnel de surveillance.

Un travail important qui faisait suite à différentes plaintes émanant des détenus ou de leur famille. "(...)On ne peut pas banaliser cette pratique qui touche à l’intimité et à la dignité humaine. L’enquête a montré que ces fouilles intégrales ne se déroulent pas toujours dans des conditions optimales et pourraient clairement être évitées dans certaines circonstances. Il faut immédiatement mettre fin aux fouilles à nu systématiques", indique Catherine De Bruecker, médiatrice fédérale dans La Libre.

Le rapport reprend au total 37 recommandations, dont l’arrêt sans délai des fouilles à nu systématiques, "une pratique illégale", selon l'avis même de la Cour constitutionnelle qui a estimé, en 2015, que le recours systématique aux fouilles à nu contrevenait à l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme qui interdit tout traitement inhumain ou dégradant. “Mettre une personne à nu pour l’inspecter doit absolument rester l’exception”, insiste la médiatrice.

Et pourtant... "Les agents pénitentiaires connaissent mieux mon anatomie que ma femme" , a raconté un détenu à l’équipe d’enquête. Il a fini par abandonner son travail en prison à cause des fouilles à nu. Certains doivent s’y soumettre après chaque rencontre intime avec leur compagne . Mais pas tous. Des différences de traitement qui "génèrent des tensions et un sentiment d’arbitraire" , précise Catherine De Bruecker.

De plus, il n’existe pas de données centralisées sur les résultats de ces fouilles à nu (découverte d'arme, d'objets interdits ou de stupéfiants), ce qui empêche d’objectiver leur efficacité et leur utilité, révèle la médiatrice fédérale.

(LpR - Source : La Libre/Picture: Pixabay)

LpR

LpR

Journaliste FR @Tagtik - Rubriques politique - société - économie - conflits

Pour aller plus loin